Menace de préavis de grève

Les négociations engagées depuis plusieurs mois avec l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam) pour signer un avenant tarifaire à la convention de 2008 sont « bloquées », constatent les responsables de l’Union nationale et syndicale des sages-femmes (UNSSF) et de l’Organisation nationale des syndicats de sages-femmes (ONSSF).

Une nouvelle rencontre est prévue le mercredi 25 novembre avec les représentants de l’assurance maladie mais les syndicats de sages-femmes estiment que les pouvoirs publics restent sourds à leurs revendications.

Les sages-femmes, qui dénoncent le gel de leur lettre-clé SF depuis 2002 (à 2,65 euros), refusent « d’accepter de nouvelles responsabilités » si elles n’obtiennent pas des « tarifs acceptables » pour leurs actes.

Le périmètre de ces nouvelles responsabilités ne les satisfait d’ailleurs pas, les sages-femmes reprochant aux responsables de l’assurance maladie de vouloir aujourd’hui les cantonner dans « des couloirs », et de morceler leur pratique professionnelle, afin de procéder à des économies et de « désengorger » l’hôpital.

« On nous demande de faire de la gynécologie bradée », a dénoncé la présidente de l’UNSSF, Jacqueline Lavillonnière.

Un nouveau dispositif est ainsi à l’étude, destiné à encourager les sorties précoces des femmes de la maternité après leur accouchement, en systématisant un suivi à domicile par les sages-femmes à partir du deuxième ou du troisième jour, alors que la surveillance à domicile peut être actuellement assurée dans le cadre plus coûteux de l’hospitalisation à domicile (HAD).

Sollicitées sur divers créneaux, les sages-femmes réclament aujourd’hui de pouvoir avoir une compétence générale en matière de suivi des grossesses à faible risque, au même titre que les médecins.

« Nous voulons réorienter le suivi des grossesses (à faible risque) vers les sages-femmes (…). La patiente doit avoir une liberté totale de choix » et décider d’être suivie indifféremment « par un médecin ou par une sage-femme », a estimé la présidente de l’ONSSF, Christelle Gerber-Montaigu.

Cette réappropriation du « coeur du métier de sage-femme », relève d’une « vision de santé publique », alors « qu’il n’y aura plus suffisamment de gynécologues-obstétriciens d’ici cinq à 10 ans », posant un « problème de prise en charge des femmes », ont fait valoir les représentants syndicaux.

DEMANDE D’UNE RECONNAISSANCE DE L’ASPECT MEDICAL DE LEUR ACTIVITE

Dans cette perspective, les deux syndicats réclament de pouvoir accéder à la classification commune des actes médicaux techniques (CCAM), pour les actes dont elles partagent la compétence avec les médecins.

« Il n’y a pas de raison que notre consultation (à 17 euros) soit différente de celle du médecin. Nous sommes traitées comme si nous n’avions aucune compétence médicale », a ajouté la présidente de l’UNSSF.

Revendiquant la reconnaissance de l’aspect médical de leur activité, les sages-femmes réclament la nomination de sages-femmes conseils, au même titre que les médecins et les chirurgiens dentistes.

Si les sages-femmes n’entendent pas « engager de guerre fratricide avec les médecins », leur revendication intervient au moment où des syndicats de médecins dénoncent déjà l’extension de leur compétence en matière de contraception.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2010 prévoit en effet de leur permettre d’assurer la surveillance et le suivi biologique en matière de prescription de contraceptifs, jusque-là réservé au médecin traitant (cf dépêches APM CAMK6001, APM CAMKD001 et APM COMKF003).

Les parlementaires de la commission mixte paritaire (CMP) ont maintenu mercredi l’article permettant aux sages-femmes d’assurer la surveillance et le suivi biologique d’une prescription de contraception. En revanche, ils ont supprimé la mention, ajoutée par les sénateurs, selon laquelle les sages-femmes auraient dû adresser une patiente à son « médecin traitant » en cas de situation pathologique, au lieu d’un médecin (cf dépêche APM HMMKJ003).

Cette extension de compétence « ne faisait pas partie de nos revendications prioritaires », de même que l’IVG médicamenteuse, ont fait valoir les syndicats de sages-femmes au cours de la conférence de presse.

Toutefois, les sages-femmes se disent « prêtes à assumer ces nouvelles compétences », à condition qu’on leur propose une revalorisation tarifaire satisfaisante, et dénoncent l’attitude des syndicats de médecins, dont certains ont évoqué des risques en terme de santé publique.

« Parler d’un transfert de compétence entre médecins et sages-femmes, ou pire encore, d’introduction d’un risque pour la santé publique est grave et non fondé », dénoncent les syndicats de sages-femmes, rappelant que la profession disposait déjà de prérogatives en matière de suivi biologique de la prescription de contraceptifs dans trois cas, dans les suites de couches, lors de l’examen post-natal et après une interruption volontaire de grossesse.

A la suite de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), de l’Union régionale des médecins libéraux (URML) de Bretagne et du Syndicat des gynécologues libéraux, l’Union généraliste (né de la fusion d’Espace généraliste et de la branche généraliste de la Fédération des médecins de France (FMF)) dénonce jeudi dans un communiqué « des transferts de soins inutiles ».

« La collaboration entre les sages-femmes et les médecins permet une meilleure prise en charge de la femme enceinte si, et seulement si, le rôle de chacun est bien défini. Le projet de loi actuellement proposé mélange les rôles et compétences et met en place une concurrence déloyale et inutile au lieu de proposer une émulation à la coopération et à l’excellence au bénéfice des patients », déclare le syndicat.

ca/ab/APM polsan

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